Au bord des mondes, une magnifique histoire de la peinture aux éditions Hermann.

Mot de l’auteur, Serge Salat

Ce livre est né d’une intuition : du XIVe au XVIe siècle, une grande partie de la peinture européenne a tenté de convertir le regard en vision spirituelle afin d’accéder de manière imaginaire au monde divin. J’ai alors voulu inviter les lecteurs à une traversée nouvelle de l’histoire de la peinture renaissante.

Ce travail, qui a duré dix ans, a été porté par de passionnantes découvertes dans les détails cachés au sein des oeuvres, comme les reflets d’une fenêtre de notre monde dans la broche d’obsidienne d’un Christ de Campin qui, sur unfond d’or byzantin, représente une Sainte Face devenue vivante et nous regardant intensément. Loin de construire une théorie unifiée, ce livre cherche à saisir dans chaque oeuvre son mystère singulier. J’ai conçu l’iconographie et dessiné le story-board des pages comme une aventure de l’oeil, comme un parcours cinématographique avec des alternances de regard lointain et proche révélant des détails presque invisibles, comme chez Fouquet les reflets dans le marbre noir du siège de la Vierge et le chérubin rouge qui nous regarde. Dans toutes ces oeuvres, j’ai retrouvé des échos de mes propres recherches artistiques, avec Françoise Labbé, sur l’entrecroisement de mondes impossibles dans des
dimensions paradoxales.

La richesse iconographique et structurelle du thème appelait une composition polyphonique. Les deux volumes d’Au Bord des Mondes alternent l’analyse des enjeux de la métamorphose des images entre la fin du Moyen Âge et le début de l’Âge classique et un regard de très près sur la peinture, ses structures, ses détails, ses bords et ses débords, ses cadres et ses décadrages, son chromatisme, ses lumières. J’espère à travers ce livre inspirer au lecteur le goût de voir ou de revoir au plus près la peinture.